mercredi 28 septembre 2016

Où est la frontière entre l'hommage et le voyeurisme? "Mémorial tour" de Chris Simon: le tourisme noir poussé à l'extrême



Où finit l'hommage et commence le voyeurisme? Résidente niçoise, c'est la question que je me pose lorsque je circule avec mon vélo sur la promenade des Anglais et que je vois les touristes rassemblés devant la multitude de bouquets de fleurs déposés en mémoire des victimes de l'attentat du 14  juillet, certains recueillis, d'autres se prenant en selfie devant; c'est joli, on voit la mer au fond. Les petits jouets en peluche posés par terre rappellent qu'il y avait beaucoup d'enfants; c'est encore plus émouvant... 
Les gens sont férus de sensationnel et les médias nous jettent en pâture toutes les catastrophes en insistant sur le malheur des victimes. De l'empathie au voyeurisme il n'y a qu'un pas.
J'ai mis du temps après l'attentat, avant de retourner sur ce que nous appelons "la prom". Je sais que certains ont eu, au contraire, besoin "d'exorciser" en revenant sur les lieux de l'horreur et je peux le comprendre. Mais qu'en est-il des gens qui ont fait le déplacement pour voir "en vrai", l'endroit que les chaînes de télévisions ont passé en boucle?

C'est ce qu'a évoqué pour moi le très original roman de Chris Simon: Mémorial tour. 


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Suite à une surprise de son mari, l’héroïne se retrouve dans un voyage organisé, censé faire revivre aux participants la déportation. Ce qu'ils imaginaient être un simple jeu de rôle se transforme peu à peu en cauchemar.
Ce livre très vivant, écrit un peu comme un reportage avec beaucoup de dialogues et de descriptions, nous transpose littéralement dans la peau des personnages et nous fait vivre leurs angoisses en direct. Mais s'il en a le rythme, ce roman est loin s'être un simple thriller. Il nous rappelle les horreurs des camps de concentrations et une fois terminé, il génère une foule d'interrogations. 
Sur ce tourisme noir, qui, sans être poussé à l’extrême comme dans l'histoire, existe bel et bien. Sur le besoin de sensations fortes et de mise en danger, alimenté par les émissions de télé-réalité. Sur le voyeurisme. Sur les médias.
Et où met-on le devoir de mémoire dans tout ça? 

Après un livre aussi riche, un débat s'impose. 

Si vous voulez en savoir plus, retrouvez Chris Simon sur :
Tentative de retracer l'histoire du mémorial tour
                                     

2 commentaires:

  1. Bonjour,
    Effectivement au dela de "l'intrigue" rondement menée crescendo, avec une foultitude de détails vraiment réalistes et cohérents, on est en droit de se demander si l'appartenance à un groupe délite et etiole progressivement le devoir de mémoire, si la visite en dehors des tours operator et des voyages organisés n'est pas plus efficace pour le devir de mémoire. C'est en tout cas ce qui m'a permis de ressentir le tragique des massacres de cette même pèriode lors de ma visite en binome sur le site d'Oradour sur Glane.

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  2. Merci pour ce témoignange. Je crois que tu touches à un point intéressant, visite ou recueillement ? Seul (ou en petit nombre) on est plus enclin à se recueillir qu'en groupe parce que l'intimité permet de se laisser aller aux émotions à son rythme. Le problème ce sont les mots : visite, musée...

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